dimanche 30 novembre 2014

un jeu grandeur nature

Je déglutis difficilement en entendant la nouvelle ; si je réussissais, je pourrais voir Marie, Anna et Gabriel en chair et en os. Avant d’avoir eu le temps de me ressaisir, le mur devint de plus en plus transparent, émettant un petit sifflement qui s’amplifiait petit à petit. La foule jusque là immobile se mit soudain en mouvement, s‘aplatissant contre la paroi et se ruant dehors à sa disparition totale. Quand à mon tour je sortis, devant moi s’étendait une plaine herbeuse baignée de soleil, de petites fleurs ajoutaient une touche de couleur à ce paysage déjà magnifique. Quelques buissons de baies poussaient par ci par là, on pouvait apercevoir au loin l’orée d’un immense bois. La plupart n’y firent pas attention et piétinèrent ce paradis naturel sans le moindre remords.
Je fus sorti de ma contemplation par Anna qui me tirait par la manche de mon tee-shirt en pointant du doigt un sommet rocheux qui s’élevait largement au-dessus des arbres et continuait pour se perdre dans les nuages grisâtres qui recouvraient le ciel.

-Faut se dépêcher ! On ne sera pas les premiers à cette allure !

Opinant en silence, nous nous élançâmes à notre tour en direction de ce majestueux pic, l’assassine en tête, Marie derrière elle, moi, et enfin Le Faucon qui fermait la marche. Nous traversâmes la plaine rapidement pour ensuite déboucher sur une grande forêt. On entendait, venant des cimes des arbres, des chants d’oiseaux de toutes sortes.
Sans nous soucier du paysage, nous continuâmes de courir pendant plusieurs heures ; lorsque nous fîmes une pause, j’étais épuisé, mes jambes tremblaient et mon cœur battait douloureusement dans ma poitrine, la lumière commençait à baisser et il ne tarderait pas à faire nuit. Si nous voulions arriver les premiers à notre objectif, marcher de nuit serait la meilleure solution mais je ne sentais pas vraiment prêt pour un nouveau marathon. A côté, mes héros étaient dans le même état que moi, seule Anna semblait en forme, prêté à repartir.

-Allez, nous motiva-t-elle, il faut y aller.

-Je suis crevé, soufflai-je.

-On ne va pas passer la nuit là quand même, allez debout, je veux bien ralentir le rythme mais pas question de s’arrêter.

Sur cette injonction, nous nous remîmes en marche, soufflant comme des animaux et gémissant à chaque mouvement. Notre guide décréta un arrêt à l’aurore. N’ayant pas besoin qu’elle nous le dise deux fois, chacun se trouva un petit coin pour se reposer ; Anna n’était toujours pas fatiguée et préféra monter la garde. Du coin de l’œil, je regardais Marie, celle-ci s’était allongée contre une énorme racine et dormait déjà.
A mon réveil, le soleil brillait et, vu sa position, j’estimai qu’il devait être moins de midi ; mes membres étaient engourdis par le sommeil et transis par la fraîcheur de la matinée.
Sans même prendre un petit déjeuner, Anna reprit la direction de la montagne. Vu la distance qui nous séparait d’elle, nous y serions avant la fin de la journée, du moins je l’espérais. Revigorés par ce maigre repos et malgré nos estomacs qui grondaient, la marche se fit à bon rythme et quand nous nous arrêtâmes, vers midi, les contours du massif se dessinaient plus précisément.
Mourant de faim, nous dénichâmes rapidement un petit buisson plein de mûres, même si cela ne suffit pas à combler la faim qui nous tiraillait. Mais manger nous fit le plus grand bien.
Je tentai maladroitement de créer un repas plus consistant mais tout ce que j’obtins fut une purée marron peu appétissante. Ayant le ventre quasiment vide, nous ne jouâmes pas les difficiles et avalâmes, sans grand plaisir, ma création. L’aspect n’était peut être pas génial mais le goût en revanche faisait penser à de la viande bouillie avec un arrière-goût de pomme de terre. Enfin, lorsque chacun eut fini les assiettes de fortune que j’avais écrites, Anna nous força à repartir et ne laissa aucun membre du groupe protester. Etonnamment, il n’y eut aucune attaque, nous, qui pensions croiser des ennemis, fûmes rassurés en pensant qu’ils n’étaient pas encore arrivés jusqu’ici.



Tout comme l’après midi précédent, nous marchâmes sans cesse. Moi qui pensais atteindre le pied de la montagne dans la journée fus déçu. Face à nous ronronnait un fleuve aux eaux turquoise ; étant trop profond et trop rapide pour être traversé à la nage, nous le longeâmes longuement avant de trouver un endroit où le courant était moins fort.
Mes jambes encore couvertes de sueur accueillirent la froideur de l’eau avec joie, le reste de mon corps aussi d’ailleurs. 
Une fois le fleuve traversé, nous nous reposâmes en faisant sécher nos affaires ; Gabriel et moi n’avions aucun problème de pudeur et deux maillots de bain. Les filles en revanche refusaient d’être à moitié nues au milieu de la nature, je finis par me plier à leurs caprices et leur dessinai deux confortables peignoirs dont elles se vêtirent immédiatement. Franchement, quel mal y a-t-il à porter un maillot de bain ? De plus c’est bien moins contraignant à créer. 
L’attitude de Marie ne changea pas des masses ; mis à part qu’elle réussissait maintenant à me regarder sans rougir, ses paroles restaient rares et son visage était fermé. Nos vêtements séchèrent malheureusement vite avec ce grand soleil et, rapidement, nous recommençâmes à marcher, Anna toujours devant. Qu’avais-je mis dans son portrait qui l’avait rendue si endurante ? Alors que je me posais cette question, nous débouchâmes sur une large clairière balayée par une brise rafraîchissant. En son centre se trouvait un jeu d’échecs en marbre ainsi que deux chaises. Approchant prudemment, nous arrivâmes près du plateau ; pas besoin d’être bien malin pour sentir le piège. Observant la table, je saisis une des pièces et la regardai attentivement.

-Je ne sais pas qui a fait ça, déclarai-je en reposant le roi blanc à sa place, mais nous devrions partir avant de nous faire attaquer.

N’entendant aucune réaction de mes héros, je me retournai et découvris, effaré, qu’ils avaient disparu.

-Anna ! Gabriel ! Marie !

-Inutile de crier, ils ne t’entendront pas.

La personne ayant prononcé cette phrase était assise dans un des sièges et me toisait d’un regard mauvais.

-Ils ne reviendront que si tu gagnes la partie !

-Mais je n’ai aucune envie de jouer, m'énervai-je.

-Trop tard, cela a commencé dès que tu as touché la pièce. Maintenant assieds- toi et joue !

N’ayant pas le choix, je pris place, face à lui.

-Tu connais, je suppose, les règles des échecs. Cette partie sera un peu différente, chaque pièce sera un escadron humain, tu comprendras vite ce que cela implique. Ton héros masculin est la Tour en H1, la fille aux cheveux courts, ton fou F1 et la dernière est la reine, tu es bien évidemment le Roi. Bien, il est temps de commencer, les blancs démarrent.

Aucun doute, ce type était sérieux, le combat se déroulera en une partie grandeur nature.

-Pion D2 en D4, annonçai-je sobrement.

Soudain la terre trembla, la clairière disparut, remplacée par une forêt dense dans laquelle évoluait un groupe d’hommes armés. Sans montrer de signe d’étonnement, l’autre bougea à son tour.

-Cavalier B8 en C6

Une nouvelle fois, le décor changea, une troupe d’hommes montés arpentait une grande plaine sous un soleil de plomb.

-Pion C2 en C3

-Cavalier G8 en F6

-Pion F2 en F3

-Pion G7 en G6

-Pion H2 en H4

-Fou F8 en H6

Les paysages défilaient les uns après les autres, d’abord une plaine sillonnée par l’infanterie, puis un marécage où les cavaliers, descendus de leurs montures, tiraient par la bride les animaux qui refusaient d’avancer. Enfin, au dernier coup, apparut une horde de guerriers enragés, courant en hurlant à travers un camp en feu, voilà donc ce qui nous servait de fou. Au milieu des tentes embrasées, j’apercevais une femme faisant face à un assaillant, un cahier dans les mains.

-Mais c’est un auteur !

-C’est exact, nos pièces sont ce qu’il y a de plus réel et elles évoluent ici même. La preuve, regarde là-bas, rajoutait-il en pointant une colonne de fumée à l’horizon, mon fou est là-bas, la fumée que tu vois vient du camp qui brûle. Les auteurs se trouvant sur le chemin de nos pièces seront attaqués, cependant il est possible que ta pièce se fasse battre par cet adversaire improvisé.

Cet homme me plaisait de moins en moins, il ne m’annonçait cela que maintenant, je risquais d’attaquer des auteurs par hasard.

-Pion G2 en G4

La téléportation nous emmena au milieu d’un désert aride, des soldats, accablés par la chaleur, peinaient à mettre un pied devant l’autre.

-Tu es inattentif, lâcha mon opposant, mon fou H6 prend le tien en C1 !

Sur l’échiquier, ma pièce disparaissait, laissant place à la sienne. Le combat entre les deux tribus de fou était des plus sanglants. N’éprouvant aucune peur, les deux camps chargeaient sans réfléchir, armes levées en poussant des hurlements barbares. Au final, seuls les siens restèrent debout, victorieux. La plaine alentour était jonchée de cadavres encore chauds, l’herbe souillée de sang offrait une scène des plus lugubres.

-Roi D1 prend le Fou en C1

Tout d’un coup, la bataille devint réelle, je n’étais plus assis mais debout et encerclé par les fous ennemis. D’abord étonnés, ceux-ci ne tardèrent pas à attaquer, à environ vingt contre un, mes chances de fuite étaient nulles. Evitant un premier coup d’un pas de côté, je contrattaquais immédiatement, mon poing cueillit le barbare juste sous le menton. Mais le barbare mesurait presque deux mètres et pesait facilement cent kilos, si bien que l’uppercut ne suffit pas. Je l’attrapai par les cheveux, bondis et lui écrasai la tête contre mon genou.
Se fichant complètement de son compagnon, un nouvel ennemi brandit dans ma direction son énorme hache. Il l’abattit cependant dans le vide, déjà j’étais sur lui et mes armes fraîchement matérialisées lui ouvraient le ventre. Les deux suivants finirent également à terre, le premier avec un bras cassé dû à une clé de bras plutôt musclée, l’autre se tenant les bijoux de famille en gémissant. Ainsi, un par un, mes ennemis terminèrent leur combat face contre terre, conscients ou pas. Le jeu d’échecs réapparut non loin, en attendant mon retour, l’homme griffonnait quelque chose sur une feuille.

-Que faites-vous, criai-je avant de le rejoindre.

- Rien du tout, des petites modifications qui, tu le verras, sont très utiles, en tout cas pour moi.

Sans demander plus d’explication, je me rassis, essoufflé ; il me fallait jouer le moins possible avec le Roi. Mine de rien, un fou avait réussi à m’atteindre, ma jambe me lançait douloureusement là où son épée avait ouvert un sillon peu profond mais tout de même assez étendu. Mon opposant, dont je ne connaissais pas le nom, reprit la partie comme si de rien ne s’était passé.

-Pion D7 en D6

-Cavalier B1 en D2

-Pion E7 en E5

-Reine E1 en F2

Les vues continuaient de défiler mais je n’y faisais aucunement attention ; rester concentré avec une blessure était déjà en soi une gêne.
Cependant la vision de Marie, galopant dans le sable sec du désert, un tissu maintenant ses cheveux en chignon, m’absorba. Il émanait d’elle une aura féroce que je ne lui connaissais pas. Une mini armée la suivait, composée majoritairement de femmes guerrières ; tous semblaient souffrir de cette chaleur sèche qui les accablait. Tandis que je finissais mon tour, une de mes pièces, Pion H4, disparut.

-Qu’est ce que… Pourquoi est-elle morte ?

-Je crois que ta pièce est morte de soif au milieu du désert, d’ailleurs ton pion G4, F3, ta reine F2 et ton fou F1 ne devraient pas tarder à subir le même sort.

-Comment est-ce possible ! Me lamentai-je. Et comment suis-je censé les aider !

-C’est simple, comme moi tu leur écris une oasis, un camp avec des rations d’eau et de nourriture, ou quelque chose comme ça. Tu peux agir en temps réel sur le jeu. Pion H7 en H5

-Fou F1 en H3, grommelai-je. Si vous avez d’autres règles cachées, dites-les dès maintenant !

Répondant par un petit rire sec, il continua, visiblement rien ne semblait le gêner dans le fait de révéler une règle en milieu de partie. Mais, cependant, la possibilité d’influer ainsi sur le jeu m’offrait de nombreuses ouvertures. Malgré ma jambe qui me lançait toujours, je n’oubliai pas le plus urgent, créant pour mes pièces en difficulté un certain nombre de ressources qui leur éviterait une mort certaine.

-Reine E8 en E6

-Cavalier D2 en C4

-Pion B7 en B5

-Pion B2 en B3

-Fou C8 en A6

Malgré son flagrant manque de fair-play, il fallait reconnaître qu’il était très fort, il contrait chacun de mes coups et amenait la partie dans une impasse où le premier qui jouerait se trouverait fortement défavorisé par la suite. Le moment était venu pour moi d’appliquer mon idée.

-Reine F2 en E3

-Tour H8 en H6

Tout allait se jouer en fonction de ce coup, si tout se passait comme je le voulais, la partie tournerait en ma faveur.

-Pion D4 prend le Pion E5

Mon adversaire marqua un temps de surprise mais se reprit rapidement et joua avec un grand sourire sadique.

-Pion D6 prend Pion E5

-Cavalier C4 prend le Pion E5

-Cavalier C6 prend Cavalier E5

-Pion G4 prend Pion H5

Deuxième surprise de la part de celui qui, jusque là, restait quasi impassible. Autour de nous les morts s’entassaient, cavalier comme infanterie, dans un carnage sans nom.

-Euh…je… Pion G6 prend Pion H5

Dégotant quelques lignes libres sur une feuille de brouillon, j’écrivis à toute vitesse :
« Une épidémie, qu’ils attrapèrent en traversant les marécages, affaiblit considérablement les Fous blancs », avant de jouer mon coup

-Fou H3 prend la Reine E5

-Bien joué, cracha mon interlocuteur en se mordant la lèvre. Pion F7 prend le Fou E6

-La Reine E3 prend le cavalier en E5

-Pion H5 en H4

Alors qu’il finissait son tour, un de ses Pions disparut.

-Que se passe-t-il, rugit-il en bondissant de sa chaise, qu’as-tu fait ?

Les rôles étaient enfin inversés.

-Rien, répondis-je calmement, mon fou était atteint d’une maladie mortelle et contagieuse attrapée dans les marécages. Une chance pour moi, ton pion l’attrapa également durant l’affrontement. Au fait, ma Tour H1 prend le Pion H5.

Ne décolérant pas, il se rassit et prit ma tour H5 avec sa Tour H6.

-Ma Reine prend le Cavalier F6, échec au Roi.

Autour de l’homme se matérialisèrent trois femmes en armures qui pointèrent leurs armes vers lui.

-Roi D8 en C8

Les guerrières disparurent.

-Reine prend le Fou en A6, échec au Roi

De nouveau le cortège revint, plus près de leur cible cette fois. Nouvel accès de fureur, mieux contrôlé cette fois. Autour de nous, je voyais Marie qui volait de victoire en victoire, son armée battant l’infanterie la plus faible jusqu’aux cavaliers les mieux organisés.

-Roi C8 en D8

-Reine A6 en C6

-Tour A8 en C8

-Pion A2 en A4

-Pion B5 prend Pion A4

-Tour A1 prend Pion A4

-Pion A7 en A5

-Pion B3 en B4

Mon opposant était désormais bien calé sur sa chaise, son regard bougeait sans cesse d’une pièce à une autre tandis que la sueur perlait de son front. Ainsi stressé, j’espérais qu’il fasse dès erreurs qui me concéderaient la victoire.

-Pion A5 prend Pion B4

-Tour A4 prend Pion B8

-Tour B4 en E4

-Roi D8 en C8

Enfin il avait fait l’erreur tant attendue ! Il s’en rendit heureusement compte trop tard et ne put annuler le mouvement.

-Tour E4 en E8, échec et mat !

Les trois guerrières réapparurent et se jetèrent sur mon adversaire en hurlant. Le jeu d’échecs disparut, les décors cessèrent de changer et j’apercevais, un peu en retrait, mes héros. Marie et Gabriel semblaient sain et saufs, mais Anna, morte dans la partie, reposait dans l’herbe, froide, sans vie.

-Que s’est-il passé ? demanda Gabriel, nous étions près du plateau puis plus rien.

-C’est compliqué, expliquai-je, l’important est de ressusciter Anna, vu son état cela risquait de prendre un certain temps, de toute manière le fait de la soigner nous coûtera deux heures d’immobilisation.

Derrière, le cadavre de l‘auteur commençait à disparaître dans un petit nuage de fumée.



mercredi 19 novembre 2014

calme avant la tempete

10


La veille de l’affrontement final, les serveurs nous distribuèrent à tous du règlement que nous nous empressâmes de lire :

« Avis à tous les participants, Le concours débutera demain à 12h pile et finira lorsque qu’il ne restera plus qu’un participant. Chaque joueur éliminé devra sortir de la zone en brandissant un drapeau blanc afin de montrer aux autres joueurs que vous n’êtes plus en course. Il est cependant autorisé, si vous perdrez un héros ou s’il est blessé, de le soigner, vous devrez dans ce cas rester à votre emplacement durant deux heures avant de reprendre part au combat. Pendant ce laps de temps vous pourrez bien sûr être attaqués. Il vous est bien sûr possible d’attaquer directement les auteurs afin de les mettre hors jeu, toute alliance est possible, souvenez-vous cependant qu’il n’y aura qu’un gagnant. La possibilité d’abandonner est évidemment possible, vous devrez alors sortir de la zone de combat. »



Il y avait au verso de la feuille un plan assez détaillé de l’arène dans laquelle nous devrons nous battre. Je tressaillis en découvrant que, non seulement elle regroupait tous les types de terrains naturels possibles : mers, déserts, forêts denses, glaciers, montagnes rocheuses, plaines, hauts plateaux, vallées, plages, mais aussi car elle était, comme vous l’aurez sans doute compris, immense !
D’après l’échelle de grandeur, elle s’étendait sur un rectangle d’environ 200km de longueur et presque le double en largeur, certes nous étions des centaines, même des milliers désormais car il en arrivait chaque jour des nouveaux, mais tout de même. Vu la composition de mon groupe, certains terrains comme les montagnes étaient assez avantageux, à condition d’être celui qui tire et non l’inverse.
Des questions plein la tête, nous partîmes manger. Là, après avoir fini nos assiettes, nous choisîmes à l’unanimité de nous diriger dès le début du combat vers la montagne. D’autres auteurs décideraient aussi de prendre cette direction, il ne fallait donc pas traîner afin d’arriver en premier.
Aucun duel ne se fit pendant le reste de la journée, personne ne se souciait plus du classement et ne se concentrait plus que sur la tactique à adopter le lendemain. Même le soir, les tables du salon ne se désemplissaient pas.
Inconsciemment, j’avais adopté le rythme de ce monde et dès que les derniers rayons du jour disparurent derrière les titanesques murs de pierre, je partis me coucher. Une interrogation restait, où se déroulerait la guerre ? Certainement hors de l’enceinte du bâtiment, cela serait la première fois que je verrai ce qui se trouve après ces murs immenses. La question s’en alla lorsque le sommeil m’emporta.
.Alors que je dormais profondément, rêvant que je gagnais la bataille, une main me secoua doucement, me sortant finalement de mon sommeil. Marie ne dormait pas, debout près de moi, elle me secoua de plus en plus fort :

-Quoi, grognai-je, qu’est ce qu’il y a ?

-J’ai peur.

-Tain…Tu ne peux pas avoir peur la journée ?

-J’ai peur pour demain !

-Ha. T’en fais pas, on va gagner. Maintenant dors !

Même si je ne les pensais pas vraiment, j’espérais qu’elles la rassureraient un peu.

-Mais si tu perds, on disparaît tous, glapit-elle.

-Raison de plus pour ne pas perdre, et puis tu l’as bien vu, il est possible d’abandonner. Maintenant dors, on verra ça demain !

Je me retournai dans mon fauteuil, mettant ainsi fin à toute discussion, cherchant de nouveau à m’endormir, j’entendis mon héroïne sangloter ; peut-être était-elle un peu trop sentimentale.
Je me levai, titubai jusqu’au lit, enjambai Anna endormie et me couchai près de Marie. Celle-ci se pelotonna immédiatement contre moi et enfouit sa tête dans ma poitrine. Je caressais délicatement ses cheveux, tentais d‘estomper sa tristesse et de calmer ses sanglots en prononçant des paroles réconfortantes.
Mon esprit étant engourdi par le sommeil, mes souvenirs concernant ce qui allait se passer sont assez embrouillés, je ne garantis donc pas la véracité de mes prochaines phrases.
Il me sembla pourtant que Marie finit par s’apaiser. Relevant la tête vers moi elle s’approcha, je distinguai, à la lumière blafarde de la lune, les sillons humides laissés par ses larmes. Ses beaux yeux dorés étaient plantés dans les miens, ses lèvres touchèrent les miennes, il me sembla qu’elle enroulait ses bras autour de moi et nous nous embrassâmes un long moment.
Je passais mes doigts dans sa chevelure, prenais sa tête dans mes mains, la serrais contre moi, recherchais ses lèvres, et les embrassais avec passion.
Quand notre étreinte se termina, elle ne pleurait plus, sur son visage, une expression de calme remplaçait désormais le chagrin. Après avoir déposé un dernier baiser sur mon front, nous nous couchâmes, et elle se blottit dans mes bras et s‘endormit. Je restai encore un moment à la regarder avant de sombrer à mon tour dans un sommeil troublé.
Je fus encore une fois le dernier à me réveiller. Seul dans la chambre, je m’habillai et me lavai en vitesse pour rejoindre le salon des modifications. Malgré la cohue, je retrouvai assez vite mes personnages, dégustant un délicieux petit déjeuner composé de tartines au miel, de chocolat chaud, de crêpes et d’une dizaine de pots de confiture. 
Mes pensées n’étaient pas très claires quant à ce qui s’était passé durant la nuit : avais-je réellement embrassé Marie ou était-ce un simple rêve ? L’attitude de ma guerrière me répondit à sa place, elle fuyait mon regard et, quand je parvenais à le croiser, ses joues s’empourpraient, cela s’était bel et bien passé. L’idée de l’avoir embrassée ne me dérangeait pas le moins du monde, Marie ne ressentait pas exactement la même chose, elle était gênée et attendrait la première occasion pour se justifier, je l’avais écrite comme cela.
Le sentiment d’aimer un personnage que l’on a soi-même inventé était, selon moi, bien plus troublant qu’un simple baiser, mais je ne doutais pas que la chose se soit déjà produite à plusieurs reprises dans ce monde.


Une fois repus, nous nous rendîmes au « parc » afin de profiter des dernières heures de tranquillité. Le papier distribué hier précisait que les serveurs viendraient nous chercher une demi-heure avant le début. Le soleil annonçait une belle journée en perspective et même à cette heure la température frôlait les 20°C et l’air était très pesant, tout ce que je détestais en bref. Enervé par cette chaleur, je sortis une feuille blanche et créai une brise fraîche.
Surpris par ce courant d’air soudain, certains auteurs protestèrent, bien vite. En réponse à leurs grommèlements je forcis encore le vent. A partir de là, chacun créa son propre microclimat et nous nous lançâmes dans une compétition météo.
Une jeune femme d’origine marocaine s’entoura d’une zone de sable fin où régnait une chaleur accablante, un autre fit apparaître un nuage noir qui ne tarda pas à exploser en un véritable déluge. Le jeu dura une bonne heure et, à la fin, le gazon avait fait place à des carrés plus ou moins grands dans lesquels chaque écrivain réglait le temps sur mesure.
J’étais cependant le seul à avoir installé un climat arctique ; le sol, couvert de glace, était fouetté d’un blizzard glacial et quelques blocs de glace se formaient ici et là.
Voilà mon temps idéal, une étendue gelée dans laquelle il ferait entre 10 et 0°, Mes héros n’étaient cependant pas du même avis et je dus faire fondre ma neige afin qu’ils n’attrapent pas une pneumonie.

-On peut aussi aller au glacier plutôt qu’à la montagne, railla Anna. Qu’est-ce que tu en dis, Marie ?

L’interrogée rougit à nouveau.

- Elle ne va pas bien ?

-La nuit a été spéciale, répondit Gabriel.

Il me semblait bien qu’il était au courant. Ne dormant pas beaucoup, il devait être réveillé lorsque nous nous étions embrassés. Consciente que quelque chose lui échappait, Anna exigea d’être mise au courant.

-Pas question, balbutia Marie en s’empourprant de plus belle.

-Mais je veux savoir !

-C’est…c’est personnel.

La curieuse la jaugea de la tête aux pieds avant de s’exclamer :
-C’est un problème de fille ! C’est ça ? Tu peux me le dire. Allez !

Face au refus de Marie, Anna se mit à bouder, comme une gamine et pour la première fois depuis que je l’avais créé, le faucon rit et ne s’arrêta que quand elle se jeta sur lui en le renversant. Ils agissaient comme un père agirait avec son enfant. Se chamaillant en riant, ils ne s’arrêtèrent que quand un serveur vint nous chercher pour nous emmener, jusqu'à une gigantesque salle. Par rapport, le salon était minuscule, un nombre incalculable de personnes et de personnages attendaient, debout, impatients, inquiets. Finalement, après une attente qui nous parut interminable, un haut parleur grésilla avant d’annoncer :

-Bienvenue aux concurrents, le début du combat va bientôt commencer, à mon signal, le mur face à vous disparaîtra et vous partirez où vous voulez, sachez que pour des raisons évidentes, il est interdit de s’attaquer pendant les quatre premières heures. La zone d’affrontement contient de nombreuses sources d’eau potable, des animaux sauvages en tout genre, des arbres fruitiers ainsi que d’autres ressources alimentaires afin que vous puissiez vous nourrir. Créer se propre nourriture est bien évidemment possible et d’ailleurs fortement recommandé.

Je repensais soudain à mon hamburger vivant, mauvais souvenir.

-Il n’y a aucune limite de temps, pour information, lors de la dernière épreuve, cela avait duré environ 12 jours. Vous êtes actuellement 25 527 participants répartis dans quelques vingtaines de salles comme celle-ci, oui, cela fait beaucoup, mais il n’y aura qu’un seul gagnant. Le règlement ne stipule pas que vous devez revenir en vie, aussi, si vous le souhaitez, vous pourrez tuer directement vos adversaires sans craindre de sanction. En parlant de sanctions, il est interdit : de saboter les livres des autres ou de les voler ; de torturer ; d’attaquer une personne se rendant ou portant un drapeau blanc. Bien, je crois que tout est dit, dorénavant, vous êtes tous ennemis, oubliez vos amitiés ou abandonnez. Avant de vous quitter, n’oubliez pas ce que gagne le vainqueur, certains sont au courant mais je vais le répéter pour les nouveaux, le vainqueur pourra voir ses héros prendre vie dans le monde réel.


dimanche 2 novembre 2014

Accalmie

Le combat était enfin terminé. Il s’agissait du dernier adversaire, nous avions gagné, nous étions parvenu à résister au tueur en série, mieux, nous avions vaincu son armée et étions toujours en vie.
Perdu dans mes pensées, je restai étendu à même le sol, mon héroïne en larmes à mes côtés.
Un bruit dans le fond de la pièce me sortit de mes rêveries, il s’agissait de battements réguliers qui ébranlaient toute la salle. Ce son s’amplifia, la pulsation se faisait de plus en plus forte et de plus en plus rapprochée, bientôt, chaque coup résonnait en moi, les vibrations du sol venaient chatouiller mon corps, mon rythme cardiaque se cala sur cet étrange pouls et je ne cherchai même pas à savoir d’où provenaient ces chocs.
Soudain, une secousse fit voler un mur en éclats, l’explosion souleva un épais nuage de poussière qui empêchait de visualiser ce qu’il se passait. Après un court moment d’attente, le brouillard de débris s’ouvrit sur un groupe d’individus en uniforme policier accompagnés de deux autres personnes portant un énorme bélier.
Suite à l’entrée fracassante des agents de l’ordre, la salle entière commença à se désagréger, de gros morceaux de pierres se détachaient du plafond, des pans entiers de murs quittaient leur support, le sol se craquelait en centaines de morceaux et de larges crevasses apparaissaient çà et là. Mais, étrangement, tous ces blocs qui chutaient ne s’écrasaient pas lourdement sur les dalles fissurées, ils flottaient dans les airs et se transformaient rapidement en une poudre bleutée pour être ensuite dispersés dans l’air.
Quand cette étrange destruction s’arrêta, il ne restait plus rien de l’endroit où nous avions mené le combat contre les forces de La Fontaine. Autour de nous, dans un large périmètre, des agents de sécurité maintenaient les auteurs curieux à distance, un long cordon jaune délimitait la zone interdite au public, les agents ayant provoqué la destruction de la pièce s’approchèrent de Marie.

-Mademoiselle, demanda l’un d’eux d’une voix apaisante, est-ce que ça va ?

-Oui, c’est bon, j’ai réparé les dommages les plus importants, hoqueta-t-elle, il va mieux.

L’homme, qui possédait soit dit en passant une tête de taureau, s’étonna de la réponse de son interlocutrice, et posa rapidement son regard sur moi avant de retourner vers la guerrière.

-Oui, bien sûr, mais je voulais parler de vous. Votre héros s’en sortira, il faut maintenant que vous vous soigniez, vos blessures m’ont l’air sérieuses, et je pense que votre personnage comprendra si nous vous emmenons pour vous soigner.

L’héroïne ouvrit de grands yeux ronds en entendant les paroles du policier :

-Vous faites erreur, ce n’est pas un héros, c’est mon auteur.

Le minotaure se tourna vers ses camarades.

-Elle est encore en état de choc, il vaut mieux la porter jusqu’au médecin.

Ses collègues acquiescèrent et deux d’entre eux s’avancèrent pour aider celle qu’ils prenaient pour un écrivain à se relever. Bien que mon corps semblât s’être mis sur le mode veille, je parvins à articuler :

-Elle dit vrai, c’est moi l’auteur.

Cette simple phrase m’épuisa et je retombai dans le mutisme le plus complet, restant muet aux interrogations de nos sauveurs qui désiraient s’assurer de la véracité de mes dires. Fort heureusement Anna et Gabriel se trouvaient là eux aussi et purent confirmer mon statut.
Atterrés, les gardes décidèrent de mettre leurs questions de côté et de me transporter. Je sentais que l’on me soulevait par les jambes et par les bras ; mon champ de vision balançait au rythme des pas de mes porteurs.
Le voyage ne fut pas long, et très vite je rentrai dans une grande tente en toile blanche. On me déposa délicatement sur ce qui devait être une table en fer étant donné le froid mordant qui traversait mon vêtement déchiré.
Une nouvelle personne entra, il s’agissait de l’infirmier : ce dernier ne perdit pas de temps en paroles et se pencha au-dessus de moi. Il s’agissait d’un homme d’une quarantaine d’années, au visage glacial, ses grands yeux gris plantés dans les miens semblaient lire en moi.

-Où est-il touché ?

Sa voix, grave et monocorde, me fit frissonner.

-Un Lion l’a lacéré au torse, répondit Gabriel.

Le soigneur souleva mon vêtement et examina l’endroit indiqué par Le Faucon, ses mains palpèrent plusieurs zones spécifiques, puis redescendirent jusqu’à mon ventre. Puis, en quelques gestes, il examina mes signes vitaux avant de se redresser vers mes héros :

-Je ne sens pas de lésions internes graves et de plus ses signes vitaux sont normaux, aucune trace d’une quelconque blessure.

-C’est parce que je l’ai réparé, intervint Marie.

L’homme se tourna vers l’héroïne et la toisa durement :

-Petite, je n’ai pas le temps pour plaisanter, sache que d’autres malades m’attendent et que puisque celui-ci n’a rien, je ne vois pas pourquoi je devrais rester ici plus longtemps.

Sur ces paroles, il tourna les talons et sortit de l’abri. Sur ma table, je luttai contre cette torpeur dans laquelle je me trouvais plongé depuis ces fameuses réparations, l’engourdissement disparaissait lentement mais je pouvais désormais bouger la tête librement, et même si mes jambes restaient totalement insensibles, mes bras retournaient à la vie. L’entrée de tissu s’ouvrit sur un jeune homme :

-Eh bien eh bien, comme on se retrouve !

Je mis encore un instant à reconnaître William, l’auteur au service de l’administration qui m’avait sauvé de l’emprise de la Mort.

-J’ai croisé Gareth, l’infirmier, sur le chemin, rit-il, je ne sais pas ce que vous lui avez dit mais il semblait être en colère.

-Il ne m’a pas cru quand je lui ai dit que j’avais réparé Emmanuel, s’offusqua la guerrière.

Le garçon se retourna vers Marie avec un mélange de surprise et de méfiance dans le regard :

-Cela ne m’étonne pas qu’il ne t’a pas cru, ce que tu dis est techniquement impossible à faire dans ce monde, les héros ne peuvent pas toucher directement aux livres des auteurs, c’est une règle essentielle.

Malgré ces paroles, l’héroïne refusait de capituler, et alors que le nouveau venu s’approchait de moi, elle courut jusqu’à mon sac et en sortit un cahier avec de quoi écrire. Des barreaux de fer, émergeant de la terre, se dressèrent autour de l’auteur dans un bruit strident :

-Et maintenant ? Tu n’as pas d’autre choix que de me croire, non ?

Alertés par le vacarme, des agents entrèrent en trombe dans la tente et se trouvèrent nez à nez avec mon personnage qui, pour parfaire sa démonstration, enferma tous les héros de sécurité dans des cages.

-Ca suffit !

L’ordre fusa, et il venait de moi, en voyant la scène, l’immobilité dont j’étais victime disparut et je retrouvai le plein usage de mon corps. Quittant la froide table ou l‘on m‘avait posé, je contournai les barreaux, rejoignis Marie et lui ôtai le livre des mains. Les créations, déjà vacillantes, s’évanouirent complètement et tous récupérèrent leur liberté, William délivra une flopée de directives, après quoi les policiers sortirent, nous laissant de nouveau entre nous.

-Eh bien je ne sais pas quoi dire. Je ne peux que constater que tu parviens bel et bien à écrire, bien que cela te soit normalement impossible, et même si tes écrits sont instables il n’empêche que cela reste tout de même très étrange. Si cela venait à se savoir, tu risquerais d’avoir des ennuis.

Mon héroïne s’étonna de ces propos :

-Mais je n’ai rien fait !

L’auteur, perplexe, réfléchit un instant puis se tourna vers moi :

-Je t’ai dit la dernière fois que je serais là si tu avais un jour besoin de moi. Je suppose que ce jour est arrivé plus vite que prévu, alors voilà ce que je te propose.

Nous étions tous pendus à ses lèvres.

-Je ne dirai rien au sujet de ton personnage, je vais faire comme si rien de tout cela ne s’était passé, officiellement, tu t’es défendu contre les héros du tueur et tu t’en es sorti indemne, point à la ligne, et ainsi nous serons quittes ; je suppose que cela te convient comme arrangement ?

J’opinai, même si je ne voyais pas en quoi le fait que mon héroïne puisse écrire soit important, je comprenais en voyant la réaction de l’écrivain qu’il devait s’agir de quelque chose de grave.

-Bien, conclut-il, Maintenant que tout est réglé, je vous conseille de déguerpir, ne vous inquiétez pas au sujet de La Fontaine, l’administration a gelé ses livres, il ne pourra pas faire réapparaître son armée d’animaux. Et même si nous n’avons pas pu mettre la main sur lui, nous sommes presque sûrs qu’il s’est réfugié quelque part chez les poètes. S’il s‘éloigne ne serait-ce qu‘un peu de ses alliés, nous lui sauterons dessus.

Devant nos airs surpris, notre interlocuteur développa :

-Vous n’étiez pas au courant, l’administration a fait passer un message à ce sujet. La Fontaine a rejoint les rangs des indépendantistes, et ce sont d’ailleurs eux qui ont écrit cette salle dans laquelle vous vous trouviez. Nous ne savons pas comment ils ont fait, cependant cela prouve qu’ils travaillent bien ensemble, en sachant cela il nous est aisé de le surveiller puisque nous savons exactement où ils se trouvent.

Sa phrase m’étonna :

-Si vous savez où ils se trouvent, pourquoi ne pas y aller tout simplement ?

L’agent poussa un long soupir.

-Parce que les choses ne sont pas aussi simples, et qu’ils ont bâti leur base dans un endroit très particulier.

-Mais pourquoi s’acharne-t-il sur nous ? Demanda Gabriel

-Ça par contre, cela reste un mystère, mais qu’il se soit focalisé sur vous nous a permis de le démasquer et de le rechercher, et pour cela l’administration vous remercie. Bon, et maintenant partez vite avant que d’autres inspecteurs ne rappliquent, je suppose que ce n’est qu’une question de minutes désormais.

Il ne fallut pas nous le dire deux fois. Après avoir salué notre sauveur, je ramassai mes affaires, sortis de la tente et quittai la zone surveillée. A partir de là, nous marchâmes d’un pas pressé jusqu’à notre chambre.
Ce ne fut qu’une fois l’appartement atteint et la porte fermée à double tour que nous nous sentîmes véritablement en sécurité, ici rien ne semblait pouvoir nous atteindre.

-Dorénavant Marie, interdiction de toucher à mes cahiers ! Visiblement, que tu saches écrire poserait problème, alors tache d’être discrète !

Elle acquiesça, le silence retomba, après les événements récents, personne ne souhaitait parler et nous restions assis, pensifs, même les gargouillements ne nos ventres nous laissaient indifférents De mon côté, je ne parvenais pas à déterminer si le moment le plus horrible était le combat ou les soins de mon héroïne.